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Évolution et Rationalité
Évolution et Rationalité
Évolution et Rationalité
Ronald de Sousa, Puf, 2004, 180 p., 18 €.
Thomas Lepeltier
La rationalité tant vantée de l'être humain est surtout fondée sur sa capacité à se montrer irrationnel ! Telle est du moins la thèse que défend Ronald de Sousa dans ce livre qui analyse la notion de rationalité au regard de la théorie de l'évolution. On peut la comprendre très simplement. D'abord, remarquons que pour parler d'un être rationnel, il faut que ce dernier puisse agir ou penser de manière irrationnelle ; de fait, l'animal n'est ni rationnel ni irrationnel. Pour donner un premier sens à cette thèse, il suffit alors de regarder l'irrationalité comme un manquement à la rationalité ou, dit autrement, comme un défaut de rationalité. Mais en affirmant que l'être humain atteint son statut privilégié d'animal rationnel par sa capacité d'être irrationnel, R. de Sousa signifie plus fondamentalement que la rationalité de l'être humain est concomitante de sa disposition à formuler certains raisonnements fallacieux. Le paradoxe n'est qu'apparent. Se plaçant dans le cadre de la théorie de l'évolution, R. de Sousa accepte l'idée que la pensée rationnelle est utile à notre espèce, contribuant à son succès reproductif. Mais une fois accepté ce cadre, reste à établir précisément les avantages de cette pensée rationnelle. Pour cela, l'auteur commence par établir quelques distinctions. Selon lui, la rationalité ne nous sert pas seulement à avoir des croyances vraies (mode épistémique) ou à agir de manière efficace (mode stratégique), mais à gérer également nos plaisirs (mode axiologique). Or, ces trois modes ne sont pas toujours cohérents entre eux. Par exemple, au point de vue biologique, comme au point de vue psychologique, la meilleure stratégie ne consiste pas toujours à croire ce qui est vrai ; de fait, certaines croyances peuvent être à la fois fausses et avantageuses. La rationalité n'est donc pas univoque. Et si rationalité globale il y a, du fait de l'évolution, celle-ci ne peut se fonder que sur une part d'irrationalité. C'est pourquoi R. de Sousa conclut que l'irrationalité est la condition de la rationalité et par là même apporte, à travers ce court essai, un éclairage stimulant sur cette notion un peu trop souvent sacralisée.
Ronald de Sousa, Puf, 2004, 180 p., 18 €.
Thomas Lepeltier
La rationalité tant vantée de l'être humain est surtout fondée sur sa capacité à se montrer irrationnel ! Telle est du moins la thèse que défend Ronald de Sousa dans ce livre qui analyse la notion de rationalité au regard de la théorie de l'évolution. On peut la comprendre très simplement. D'abord, remarquons que pour parler d'un être rationnel, il faut que ce dernier puisse agir ou penser de manière irrationnelle ; de fait, l'animal n'est ni rationnel ni irrationnel. Pour donner un premier sens à cette thèse, il suffit alors de regarder l'irrationalité comme un manquement à la rationalité ou, dit autrement, comme un défaut de rationalité. Mais en affirmant que l'être humain atteint son statut privilégié d'animal rationnel par sa capacité d'être irrationnel, R. de Sousa signifie plus fondamentalement que la rationalité de l'être humain est concomitante de sa disposition à formuler certains raisonnements fallacieux. Le paradoxe n'est qu'apparent. Se plaçant dans le cadre de la théorie de l'évolution, R. de Sousa accepte l'idée que la pensée rationnelle est utile à notre espèce, contribuant à son succès reproductif. Mais une fois accepté ce cadre, reste à établir précisément les avantages de cette pensée rationnelle. Pour cela, l'auteur commence par établir quelques distinctions. Selon lui, la rationalité ne nous sert pas seulement à avoir des croyances vraies (mode épistémique) ou à agir de manière efficace (mode stratégique), mais à gérer également nos plaisirs (mode axiologique). Or, ces trois modes ne sont pas toujours cohérents entre eux. Par exemple, au point de vue biologique, comme au point de vue psychologique, la meilleure stratégie ne consiste pas toujours à croire ce qui est vrai ; de fait, certaines croyances peuvent être à la fois fausses et avantageuses. La rationalité n'est donc pas univoque. Et si rationalité globale il y a, du fait de l'évolution, celle-ci ne peut se fonder que sur une part d'irrationalité. C'est pourquoi R. de Sousa conclut que l'irrationalité est la condition de la rationalité et par là même apporte, à travers ce court essai, un éclairage stimulant sur cette notion un peu trop souvent sacralisée.
Esculape- Panacée
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